Depuis plusieurs mois, l’Etat islamique en Irak et au Levant (EIIL) a déployé de grandes qualités en matière de communication d’influence, mêlant aussi bien des messages de communication opérationnelle que de communication politique, destinés aux populations et aux forces de sécurité irakiennes. Ce mouvement jihadiste s’est notamment illustré dans sa capacité à utiliser intelligemment des outils plus classiques, proches du tractage, ou plus modernes comme les vidéos et les réseaux sociaux.
En réponse à cette puissante communication, remarquée dans le monde entier, Bagdad a donc décidé de tenter un exercice de contre-propagande. Des clips vidéos ont commencé à être diffusés à la télévision pour convaincre les Irakiens de ne pas soutenir l’EIIL tout en ayant confiance en leurs forces de sécurité.
Exercice particulièrement maladroit. Le clip présenté ici est ainsi d’une bien piètre réalisation. Surtout, il dépeint les enjeux avec des traits tellement grossiers que le public risque de ne pas se laisser prendre. Le jihadiste, présentés ici recouvert de serpents, avec une vilaine trogne, édenté et l’oeil pervers, est tout simplement tourné en ridicule par une poignée de soldats vaguement héroïques… avant d’exploser tout seul une fois éclairé par la lumière du soleil (?!!). Une image dont personne ne peut croire qu’elle soit proche de la réalité actuelle de toute une partie de l’Irak, tombée entre les mains des hommes de l’EIIL.
Or comme le remarque le Dr Steve Tatham dans une étude consacrée aux opérations d’influence américaines en Afghanistan, une trop grosse simplification qui ne répond pas aux questions de l’audience cible, ne peut guère aboutir à un résultat positif. A propos d’un exemple comparable de vidéos bourrées de clichées, diffusées pour réduire les tensions anti-américaines dans les pays musulmans en insistant sur les « valeurs partagées », il constate le manque de réussite: «Le programme, lancé en Indonésie, le pays ayant la plus grande population musulmane au monde, n’a pu trouvé de diffuseurs au Moyen Orient. Une bonne partie du monde arabe trouvait la campagne simpliste et condescendante. Les articles dans la presse, aux Etats-Unis et à l’international, ont critiqué de manière négative ce qui a été perçu comme de la mauvaise propagande.»
Or les Irakiens ont certainement vu passer eux-mêmes les vidéos et les images de l’EIIL qui pour le coup, expriment un message clair et crédible: rejoignez-nous ou mourez. Peu probable, donc, que la tentative de propagande de Bagdad n’engendre des effets servant sa cause…