DCI, pour ceux qui ne connaissent pas, est une entreprise privée qui propose en liaison avec l’Etat français des formations dans le domaine militaire. La société a pour vocation de transmettre les savoir-faire des forces tricolores, et que nos armées n’ont pas toujours les moyens de fournir. Un service qui profite également aux militaires français, nous assure-t-on. Quel intérêt pour eux? « L’influence« , nous répond ce matin Jean-Michel Palagos au cours d’un petit déjeuner presse.
« C’est un rôle méconnu de DCI, nous explique le PDG de l’entreprise. Recevoir des cadres étrangers, c’est aussi une stratégie d’influence. Cela crée du lien. C’est un investissement à long terme. » Cette logique m’avait déjà été décrite par un ancien patron de l’Odas, société semi-publique chargée de démarcher l’Arabie Saoudite dans le domaine de l’armement. Chaque fois, il s’agit de prendre en considération les conséquences de tous ces échanges et des multiples interactions avec des Français (militaires, fonctionnaires, industriels, formateurs…).
Dans le cas de DCI, les stagiaires vont ainsi nouer des relations avec leurs encadrement français. Sur certaines formations (lire ici notre reportage sur des officiers de marine qatariens), ils restent plusieurs années sur place. Apprentissage de la langue et des valeurs, sensibilisation aux matériels ou encore aux procédures françaises sont autant de choses que ces militaires ramènent avec eux dans leurs pays. L’espoir d’un dialogue favorisé par ces expériences de vies, lors de futures négociations militaires, diplomatiques ou économiques est présent dans les argumentaires des cadres de DCI. Est-ce que ça en fera des démocrates et des humanistes? Probablement pas. Mais cela aura au moins eu le mérite de les initier à la French Way of Life… et surtout à la French Way of War.
L’influence par le service
L’entreprise se félicite de proposer des formules clef en main à ses clients étrangers. Lorsqu’un jeune officier arrive à Draguignan, par exemple, pour suivre une formation à l’appui-feu, sa prise en charge est totale. On va l’aider à rattraper d’éventuels retards scolaires, le loger, le placer dans une famille française pour le sensibiliser à la culture locale, loger sa famille, assurer sa prise en charge sanitaire… Des personnels de DCI sont mobilisés pour être capables de répondre aux demandes 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7. Un sens du service qui se veut pensé en véritable avantage concurrentiel.
Jean-Michel Palagos nous raconte l’anecdote vécue par deux jeunes officiers stagiaires étrangers. Lors de leur visite médical, un surplus d’embonpoint annonce leur perte: inaptes au service. DCI réagit immédiatement en les plaçant dans une nouvelle famille d’accueil, plus à cheval sur la diététique, et en leur fournissant des coach sport et santé. A force de « sueur et de carottes râpées« , ils finissent par corriger le tir et retrouver la ligne. L’un des concernés voit donc sa future carrière sauvée par ce zèle. Ce fils d’un haut responsable de son pays d’origine risque de garder une forte reconnaissance envers son encadrement français.
Une attention indispensable. Certains de ces jeunes futurs officiers restent de véritables mômes, habitués au cocon protecteur des élites de leurs pays d’origine où ils ont souvent été élevés avec une cuiller en argent dans la bouche. Un instructeur nous a ainsi raconté l’anecdote de stagiaires étant régulièrement manipulés par de jeunes françaises intéressées par les moyens financiers de leurs princes charmants de passage. Ou encore ces élèves partis acheter une voiture en Allemagne, qui se font arnaquer par des voyous qu’ils n’avaient pas vu venir…
Quelques exemples
DCI réalise 59% de son chiffre d’affaires avec des clients du Moyen-Orient et 30% avec l’Europe. On compte également quelques contrats avec l’Asie ou l’Afrique, ainsi qu’une prospection encore balbutiante en Amérique du Sud où le patron doit pourtant visiter la poignée de pays qui continuent de bénéficier d’une santé économique intéressante (Mexique, Pérou, Chili, Colombie). Voici quelques exemples des missions menées par la société l’année dernière:
– Arabie Saoudite : Des officiers et des spécialistes sont formés dans une multitude de secteurs… équipes de sauvetages de la marine opérant sur Panther, officiers ingénieurs (7 ans en France), officiers de l’armée de terre (7 ans en France, avec passage à Saint-Cyr), commandos de l’air, instructeurs montagne pour les troupes aéroportées…
– Russie : Formation au profit de DCNS des équipages destinés à opérer sur les BPC… dont la vente a finalement été annulée.
– Koweït : Formation de pilotes de Gazelle et de plongeurs démineurs.
– Malaisie : Formation de pilotes d’Agusta 109, accompagnement de la transformation d’un escadron d’hélicoptères en escadron search and rescue, aide à la création d’une école locale de formation des sous-mariniers.
– Niger : Formation de pilotes et de mécaniciens pour hélicoptères, en France et sur place.
– Libye : Formation à la navigation d’officiers de marine, ainsi que de plongeurs-démineurs et de spécialistes des travaux sous-marins.