Quelques médias ont savoureusement relevé l’existence sur Twitter d’un compte fort sympathique, militant en faveur de l’Etat islamique en Irak et au Levant (EIIL). « Islamic State of Cat » (l’Etat islamique du chat… ?!!) propose des photos de moudjahidines en compagnie de charmants minous et autres chatons.
D’une grande richesse, ce compte propose de sympathiques clichés de pauvres chats et de leurs compagnons d’infortune, d’Alep à… la Grande-Bretagne. Cette série à thème surfe sur l‘engouement étonnant de la toile pour ces bêtes à poils et à moustaches, qui avait déjà été exploitée par des publicitaires. Ici, un jihadiste donne du lait à un chaton. Là, un autre pose chat dans une main, kalachnikov dans l’autre. Ou encore, de simples civils sont associés à la démarche, en devenant ainsi aussi bien amis des chats que des jihadistes…
Les messages semblent particulièrement décalés. Pourtant, ils sont entrecoupés d’autres, plus dédiés aux combats habituels de la cause: argumentaire jihadiste, références religieuses, encouragement au combat. Et faute d’avoir suffisamment de chats… L’auteur propose aussi des agneaux ou des chiens.
Des chats? Mais qu’est-ce que les jihadistes en ont à foutre?!
Il convient tout d’abord de se demander qui est l’auteur de ce compte. S’il semble ne pas vouloir discréditer la cause de l’EIIL et consorts, il semble tout de même être à prendre au second degré. Quelques indices (une référence à Game of Thrones, une plaque d’immatriculation britannique sur un cliché) peuvent laisser penser qu’il s’agit d’un supporter du jihad européen, probablement relativement jeune et certainement pas impliqué dans des combats.
Si la démarche peut prêter à sourire, elle peut aussi servir à plusieurs choses, tout à fait profitables aux combattants de l’EIIL et à leurs joyeux camarades:
- Humaniser. Ces photos permettent de donner un visage humain aux jihadistes. Pour équilibrer avec la multitude de documents exhibant la violence extrême, ils illustrent ici une autre réalité. De la même manière que des images d’aide aux civils sont parfois mises en avant. Les guerriers sont aussi des hommes. Ces moments sont aussi l’occasion de partager un instant de détente.
- Convaincre les sympathisants. Dans la continuité de l’idée précédente, ces images peuvent rassurer d’éventuels sympathisants ou candidats au jihad qui hésiteraient sur les motivations des combattants. Celui qui craindrait de se retrouver plongé dans le chaos absolu trouve ici de quoi le conforter: il y a les combats, mais il y a aussi l’a côté, partagé avec des camarades capables d’humour et de tendresse.
- Occuper les médias. De telles images, regroupées sous une thématique, permettent également d’occuper les médias. A la recherche d’anecdote et d’impromptu, des journalistes peuvent trouver dans cet « Etat islamique du chat » l’occasion d’un article décalé. Un article qui permet de répéter encore une fois le talent des jihadistes sur la toile. Autant de temps et d’énergie qui n’est pas consacré à l’enquête et l’analyse des violences et des crimes de guerre perpétrés par les combattants, en Syrie ou en Irak.