Dans la foulée des débuts de l’opération israélienne à Gaza, Bordure protectrice, l’ONG Oxfam UK a lancé une vaste campagne sur les réseaux sociaux pour interpeller les Internautes et les inciter à aider les populations de l’enclave palestinien. Ces messages sont particulièrement intéressants car une bonne partie d’entre eux est calquée sur ceux mis en place par les Forces de défense israéliennes (IDF).
L’armée israélienne a marqué durablement les logiques d’influence en 2012, au travers de l’opération Pilier de Défense. C’était la première fois qu’une armée utilisait de manière aussi massive et efficace les réseaux sociaux. Ses messages, simplifiés à l’extrême, permettaient de convaincre facilement toutes sortes de publics. Des arguments clairs, reposant sur des faits, devaient servir à affirmer une légitimité. D’autres, reposant sur l’émotion, permettaient de jouer sur les sentiments des Internautes. La campagne avait été massivement relayée, tant par des supporters que par des curieux. En 2014, Israël a réutilisé les mêmes outils, qui ont encore une fois obtenu une bonne visibilité aussi bien sur les réseaux sociaux que dans les médias.
Oxfam UK a publié des messages équivalents, destinés notamment à mobiliser le public britannique. Tout comme les IDF, l’ONG a ainsi comparé les souffrances des Gazaouis à ce qu’elles pourraient être pour des Britanniques. Une image qui rappelle un équivalent publié par Israël au sujet des tirs de roquettes, comme on peut le voir sur l’illustration ci-dessous (à droite, une affiche d’Oxfam, à gauche, une affiche de Tsahal).
La logique de contre-propagande développée par Oxfam vise à montrer que la situation des Gazaouis est au moins aussi compréhensible que celle des Israéliens. L’utilisation d’une charte graphique équivalente facilite le parallèle entre les deux. Largement relayée sur les médias sociaux, ces messages simples sont pratiques pour permettre une grande viralité: ils parlent à tout le monde.
Reste que l’équipe d’Oxfam attribuée à la communication n’est pas aussi conséquente que celle de l’armée israélienne. L’exercice de contre-propagande est mené avec des moyens plus raisonnables. Sa campagne a également été peu évoquée dans les médias conventionnels, qui avaient pourtant largement relayé la performance israélienne. Et pour cause: les messages de Tsahal sur les réseaux sociaux ont servi de palliatif à des réponses plus directes aux journalistes, qui ont du se contenter de cette parole construite et non dialoguée de l’armée, acteur clef du conflit. A l’inverse, Oxfam reste une simple ONG dont l’importance dans la crise est secondaire… et qui n’hésite pas à répondre à un journaliste qui préfèrera toujours un échange et des réponses à ses questions, plutôt qu’une affichette publicitaire, même si il se contentera de cette dernière s’il ne peut pas avoir autre chose.
On pourra enfin se poser une question sur le sens profond de la démarche. En renvoyant dos-à-dos les souffrances des Gazaouis et des Israéliens, l’ONG contribue à placer les victimes sur un même plan. Elle valide les arguments de Tsahal en y répondant. C’est ici la limite d’un exercice de propagande ou de contre-propagande qui repose largement sur des méthodes de manipulation (émotion et simplification abusive).