Début juillet, le Département d’Etat américain a annoncé l’ouverture officielle de Sawab Center, présenté comme le premier média d’influence multi-national. Sawab, pour « le chemin juste », vise à contrecarrer le récit des jihadistes sur différents canaux médiatiques, notamment sur Internet. Monté en partenariat avec les Emirats Arabes Unis (EAU), il est basé à Abou Dhabi. Le lancement a été fait par le secrétaire d’Etat adjoint aux Affaires publiques, Richard Stengel, et par le ministre des Affaires étrangères des EAU, Anwar Gargash.
Le Sawab Center est conçu comme un organe de contre-propagande. Il doit répondre aux messages diffusés par les jihadistes sur les réseaux sociaux, notamment pour recruter. L’objectif est de déconstruire le discours de ces derniers et d’offrir aux millions d’habitants des régions concernées par l’influence de l’organisation Etat islamique (OEI) une voix alternative. D’après le communiqué du Departement d’Etat américain, il « augmentera l’intensité du débat en présentant des voix tolérantes et modérées de la région, tout en produisant un récit constructif et fédérateur ».
Le projet est présenté comme ouvert à tous ceux qui souhaiteront y joindre leurs efforts, parmi les 63 pays qui ont décidé de se dresser face à l’OEI. Une sorte de pendant InfoOps à la coalition militaire actuellement à l’oeuvre en Syrie et en Irak. La lettre confidentielle TTU note que l’administration Obama cherche continuellement à convaincre ses alliés arabes de participer à ce types de démarches, les EAU étant pour l’instant le seul vrai bon élève. Il y est également noté que Abou Dhabi est le principal financier de Sawab Center, à hauteur de 10 millions de dollars, et emploierait quinze à vingt personnes, principalement des locaux, selon Associated Press.
L’idée de Sawab Center est de décliner la formule de Radio Free Europe, pendant la Guerre Froide. Il s’agira de mobiliser tous les acteurs de la société civile arabe dans un effort de débat et d’échanges qui permette d’isoler la position des jihadistes et de la mettre en minorité. L’important est surtout de faire parler des Arabes, des Musulmans et tous les interlocuteurs qui pourront paraître légitimes dans ce type de discours à l’audience ciblée: les populations sous le joug de l’OEI, les recrues potentielles, les sympathisants…
Sur son compte Twitter officiel, Sawab Center a commencé à diffuser des articles et des informations, en anglais et en arabe. La plupart raconte l’expérience de militants ayant rejoint les rangs de l’OEI et ayant déserté, ou encore de témoins des actions de l’organisation. On y trouve aussi bien des articles de médias anglais, comme cette comparaison du Daily Beast entre le marketing de l’OEI et celui des cartels mexicains ; que des vidéos en arabes comme celle-ci, cherchant à sensibiliser sur la violence impitoyable des jihadistes. Sawab Center a également publié un site Internet, insistant sur l’idée d’une unité globale contre l’OEI.
Une partie des contenus diffusés seront produits par le Centre de communication stratégique contre-terroriste (CSCC), un bureau du Département d’Etat, qui a commencé depuis 2011 à réaliser des documents en plusieurs langues: arabe, ourdou, somali ou encore haoussa.